Contractuels : est-il possible d’obtenir un CDI dans la fonction publique territoriale ?
Un quart de l’effectif des collectivités territoriales et de leurs établissements est constitué de contractuels, le plus souvent en CDD. Ce chiffre anormalement élevé est la conséquence de la volonté des employeurs territoriaux et du gouvernement, de disposer d’agents au statut précaire.
Alors que l’emploi public devrait être exemplaire en termes de respect des personnels, la gestion au quotidien obéit à une toute autre logique (multiplication des CDD, d’agents à temps non complet, non-respect des conditions d’emploi des fonctionnaires …) qui est de surcroît, financée par nos impôts.
Le cumul d’emplois en CDD successifs pendant six ans donne t’il le droit d’obtenir un CDI ?
Oui mais avec des conditions strictes :
• L’obligation de conclusion d'un CDI concerne tout contrat conclu ou renouvelé pour pourvoir à titre permanent un emploi permanent (voir L 332-8 du CGFP).
L’ensemble des contrats conclus pour répondre à des besoins permanents sont concernés. Les emplois permanents pourvus par des agents contractuels sur le fondement de l’article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 peuvent, aux termes de six années de CDD, donner lieu à la conclusion d’un CDI. Sont prises en compte l’ensemble des services accomplis en tant que contractuel de droit public (accroissement temporaire, remplacement, mise à disposition par un centre de gestion, etc…).
Cependant, les services accomplis par un agent dans le cadre d'un contrat de droit privé et les contrats de projet sont exclus. Cela concerne ainsi les agents de droit privé recrutés dans un service public à caractère industriel et commercial. Il en est de même des recrutements de type « vacataire » ou les contrats de projet.
• La durée des services publics doit être accomplie exclusivement dans la même structure territoriale et relever de la même catégorie hiérarchique.
À noter, les services accomplis à temps non complet et à temps partiel sont assimilés à des services accomplis à temps complet.
Une particularité : un agent recruté par un CCAS (établissement autonome rattaché à la collectivité) ne peut faire valoir ses droits pour un recrutement dans la collectivité et réciproquement. Ce principe vaut pour tous les établissements publics créés par les collectivités.
• La durée des services publics doit être accomplie de façon continue.
Toutefois, les services accomplis de manière discontinue, sous réserve que la durée des interruptions entre deux contrats n’excède pas quatre mois. Pour le calcul de la durée d’interruption entre deux contrats, la période de l’état d’urgence sanitaire déclaré sur le fondement des dispositions du code de la santé publique, dans leur rédaction antérieure à la loi n°2022-1089, n’est pas prise en compte.
Que se passe-t-il si la condition d’ancienneté des six ans intervient en cours de contrat ?
Si les conditions interviennent avant l'échéance du contrat en cours, celui-ci ne se trouve pas tacitement transformé en contrat à durée indéterminée. Les parties ont seulement la faculté de conclure d'un commun accord un nouveau contrat, à durée indéterminée, sans attendre cette échéance. En revanche, elles n'ont pas l'obligation de procéder à une telle transformation de la nature du contrat, ni de procéder à son renouvellement à son échéance.
Il s'agit-là d'une spécificité propre à la Fonction Publique Territoriale (FPT). Les dispositions concernant la Fonction Publique d’État (FPE) et à la Fonction Publique Hospitalière (FPH) prévoient quant à elles, un caractère automatique d’obtention du CDI lorsque l’agent atteint en cours de contrat une ancienneté de 6 ans, dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique.
Pour conclure, certaines collectivités n’hésitent pas à interrompre les contrats avant le délai des six ans pour ne pas avoir à transformer le contrat en CDI. On ne peut que regretter une fois de plus que la Loi Transformation de la Fonction Publique qui a généralisé le recours aux contractuels dans la Fonction Publique (et plus particulièrement dans la territoriale) n’ait pas encadré le recours aux CDD et de créer un droit à un CDI comme c’est le cas dans le code du travail pour les salariés.
Manifestement, il manque un volet législatif pour sanctionner les employeurs peu scrupuleux qui n’hésitent pas à recourir à abusivement à des CDD successifs. Rappelons que nous sommes aussi soumis au droit européen et que la Jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) condamne dans le secteur public l’utilisation abusive de CDD successifs et invite les pouvoirs publics à modifier leur réglementation en ce sens.