Interdiction du cumul d'activité pour les agents publics : une règle à repenser ?
Les fonctionnaires et les agents contractuels consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle à leurs tâches ; ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Au regard des faibles rémunérations, notamment des fonctionnaires de catégorie C et des dérogations existantes, ces restrictions obsolètes appellent à une modification réglementaire afin de mieux répondre aux réalités économiques actuelles.
Ce principe est applicable aux fonctionnaires et aux agents contractuels occupant un emploi à temps complet ou à temps non complet (un dispositif d’exception est prévu pour les agents occupant un emploi à temps non complet pour une durée inférieure ou égale à 70% de la durée légale du travail).
La violation des dispositions relatives au cumul d’activité donne lieu au reversement des sommes indûment perçues, par voie de retenue sur le traitement. L’agent en infraction doit ainsi reverser l'intégralité des sommes irrégulièrement perçues, sans déduction ni du montant de l'impôt sur le revenu éventuellement acquitté sur ces rémunérations, ni des charges engagées pour les percevoir. L'agent peut également faire l'objet des poursuites prévues par le code pénal en cas de prise illégale d'intérêts. L'agent peut en outre être sanctionné disciplinairement sévèrement voire être révoqué et ce n’est pas rare !
On peut noter depuis quelques années une banalisation de l’obligation de servir l’État ou les collectivités territoriales dans le cadre d’une carrière mise au service exclusif de l’intérêt public. Nous avons pu ainsi constater des aménagements statutaires avec la prise en compte pour l’avancement, des années effectuées hors administration.
La disponibilité au cours de laquelle le fonctionnaire exerce une activité professionnelle lui permet de conserver ses droits à l’avancement pendant une durée maximale de cinq ans selon les conditions prévues par les dispositions réglementaires. Situation qui bénéficie plutôt aux hauts fonctionnaires, destinée officiellement à favoriser les mobilités vers le secteur privé au risque de mettre en péril les obligations déontologiques et de loyauté vis-à-vis de l’employeur public.
Des dérogations récentes ont été admises
- Pour la conduite d'un véhicule de transport scolaire. À titre expérimental pour une durée de trois ans à compter du 30 décembre 2022, les agents publics (fonctionnaires et contractuels) peuvent être autorisés à exercer à titre accessoire l'activité lucrative de conduite d'un véhicule affecté aux services de transport scolaire ou assimilés.
Certes, l'exercice de cette activité ne doit pas porter atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance ou à la neutralité du service d'affectation de l'agent et ne doit pas le mettre dans une situation de prise illégale d'intérêts. L'agent doit aussi exercer l’activité dans le respect des règles de temps de travail, de conduite, de pause et de repos qui sont applicables.
- Plus récemment, le gouvernement vient d’autoriser le cumul avec une activité lucrative d'agent privé de sécurité durant les Jeux Olympiques et Paralympiques 2024. C’est ainsi que les agents publics peuvent être autorisés à cumuler leur emploi, de façon accessoire, avec une activité privée lucrative d'agent de sécurité au cours des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Cette possibilité est ouverte exclusivement durant la période du 15 juillet au 15 septembre 2024.
L’employeur étant tenu de respecter les dispositions du code du travail pour permettre à l'entreprise privée de disposer des informations permettant de s'assurer que l'agent exerce l'activité accessoire dans le respect des règles de temps de travail qui lui sont applicables.
Au final et au regard des nombreuses dérogations à cette règle de non cumul, on peut légitimement s’interroger sur l’intérêt de maintenir un dispositif législatif qui interdit par exemple à un agent de catégorie C, rémunéré au SMIC, de faire des heures supplémentaires pour une activité privé destinée à améliorer ses fins de mois.
Plus encore, les agents faiblement rémunérés par leur employeur public et dont la rémunération ne leur permet pas de subvenir à leurs besoins essentiels sont souvent obligés d’exercer une activité complémentaire sans être déclarés au risque d’être licenciés, encourageant aussi la fraude fiscale et aux cotisations sociales.
La question de mettre fin au cumul d’activité et d’aligner la situation des agents publics sur règles du code du travail mérite d’être posée !
Conditions du cumul d’emploi dans le droit du travail
Aucun salarié ne peut accomplir des travaux rémunérés au-delà de la durée maximale de travail, qui peut dépendre d’une profession à une autre. Si le salarié cumule plusieurs contrats de travail et par conséquent travaille plus d’heures que ce qu’il devrait, cela engendrera du travail illégal.
La durée maximale de travail légale est de 10 heures par jour et 48 heures par semaine (ou 44 heures par semaine, calculées sur une période de 12 semaines consécutives), tout emploi confondu.
Ces durées doivent être respectées, quels que soient le nombre d’employeurs et la durée du travail de chaque contrat.
L’employeur doit être en mesure de vérifier que le cumul des emplois de ses salariés, y compris dans d’autres entreprises n’excède pas la durée maximale du temps de travail.