Jours de carence : quelles différences entre secteurs public et privé ?
La Fédération UNSA Territoriaux attache beaucoup d’importance au respect des notions de vérité et d’honnêteté intellectuelle et les dernières annonces gouvernementales sur l’indemnisation des arrêts maladie nous amènent à clarifier les informations qui sont actuellement relayées sur notre statut !
En constante recherche de nouvelles économies, le gouvernement s’attaque aux fonctionnaires, et plus particulièrement à leur santé. Il envisage d’augmenter le nombre de jours de carence des 5,7 millions de fonctionnaires, et réduire leur rémunération durant les trois premiers mois de l’arrêt maladie.
Une mesure phare : l’augmentation du délai de carence des fonctionnaires qui passerait à 3 jours, contre 1 actuellement. Un élément de langage récurrent : l’alignement avec le régime privé. Mais en réalité il s’agit surtout d’un alignement vers le bas du bas du régime général de sécurité sociale !
Conditions d’indemnisation des arrêts maladie : public/privé
L’exécutif souhaite réduire la rémunération de l'arrêt maladie des fonctionnaires durant les trois premiers mois, passant de 100% à 90% pour dit-il, « aligner les régimes ». Le ministre oublie de préciser que les conventions collectives prévues par le code du travail, permettent aux salariés d’obtenir une source complémentaire de revenu destinée à améliorer ce régime juridique qui ne constitue qu’un minimum. Dans les faits, plus de 70% des salariés bénéficient d'accords d'entreprise ou de branche plus généreux, avec un maintien à 100% du salaire durant tout ou partie de l'arrêt.
En revanche, dans la Fonction Publique, il n’existe pas de convention collective qui pourrait compléter la perte de revenus des agents publics.
Protection Sociale Complémentaire et jours de carence
8 ans après l’obligation pour les employeurs privés de financer une complémentaire santé et prévoyance à leurs salariés à des taux de participation très avantageux, les fonctionnaires territoriaux eux attendent toujours la mise en place de la Protection Sociale Complémentaire (PSC) qui n’entrera en vigueur qu’en janvier 2025 dans la Fonction Publique Territoriale.
Cependant, la PSC ne couvrira pas la carence des 3 jours, quand les deux tiers des salariés du privé bénéficient d’une couverture, partielle ou totale des trois premiers jours d’arrêt par le biais de la prévoyance d’entreprise, qui prend le relais de l’Assurance maladie. La réalité, c'est que 70 % des salariés du privé ne subissent pas de perte de rémunération lors des arrêts maladie courts.
Absence de marge de manœuvre des employeurs publics
Quand les accords de branche améliorent les dispositions du régime légal privé, dans la fonction publique, l'employeur n'a pas le droit de rembourser les jours de carence. Il s'agit de l'application de la loi et, là aussi, d'une différence majeure avec le privé. Quelles sont les marges de manœuvre pour éviter la précarité des agents publics ? Pourquoi le gouvernement est-il toujours prêt à insérer dans les textes législatifs favorables aux agents publics, une clause ouvrant la possibilité pour un employeur territorial de ne pas l’appliquer en application du principe de libre administration des collectivités locales ? Au titre du principe de réciprocité, pourquoi ne pas faire la même chose pour des textes défavorables aux agents dans le domaine de la santé et de la protection sociale ?
Des employeurs publics « juge et partie »
Dans le régime général de sécurité sociale c’est la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) par l’intermédiaire du médecin conseil qui statue sur la situation médicale d’un agent.
Dans la Fonction Publique Territoriale, ce sont les conseils médicaux en formation restreinte ou plénière qui étudient la situation médicale des agents au regard des pièces médicales de leur dossier. Contrairement à la CPAM qui décide, en toute indépendance des employeurs, des suites à donner ; Dans la FPT c’est l’employeur de l’agent qui décide de la suite médicale quel que soit l’avis rendu par les instances médicales ! On peut noter une certaine tendance des employeurs publics à ne pas suivre les avis des instances médicales lorsqu’ils sont favorables aux agents. C’est inacceptable !
À la lumière de ces éléments de comparaison, on comprend pourquoi ces mesures ne s’aligneraient que sur le pire de ce qui existe pour 30% des salariés privés.
Cette réforme va rendre le régime de la Fonction Publique beaucoup moins favorable que celui du privé, alors que la rémunération de ses agents n’est toujours pas revalorisée en 2024, ne le sera pas en 2025, et qu’elle souffre déjà d’un déficit d’attractivité certain : 78% des employeurs publics ont des difficultés de recrutement, des problèmes de fidélisation des agents et de rotation importante des effectifs.